Publié par : Philippe Nantermod | mars 4, 2008

Chaînes nationales, langues nationales

La Suisse compte quatre langues nationales, trois officielles. Ce constat fait fréquemment notre fierté, avec raison. L’allemand est la première langue d’Europe, le français la seconde. L’italien, loin d’être en reste, constitue encore une des grandes langues du continent. Nous bénéficions ainsi d’un argument important dans nos relations internationales : une population capable de communiquer avec les plus grands du continent.

Entre nous, peuples linguistiques de Suisse, la règle fédérale veut que chacun s’exprime dans sa langue, l’autre devant au moins comprendre les autres langues officielles. Cette habitude, excellente à priori, révèle souvent un problème de poids : s’il est aisé pour les alémaniques de comprendre le français, après des années d’apprentissage de la langue, il l’est beaucoup moins pour les romands vis-à-vis de leurs collègues germanophones.

Vous l’avez compris, je veux parler du problème que pose le Suisse allemand comme langue utilisée partout outre Sarine alors que la langue apprise par les Romands et les Tessinois est l’allemand. Ce problème se reflète particulièrement dans les médias. Si la presse écrite reste en général en Hochdeutsch, les médias audiovisuels sont diffusés pour l’essentiel en Suisse-allemand. Ce constat s’est renforcé après une année passée sur les bancs de l’université de Zürich : si je peux lire avec difficultés la NZZ, il m’est carrément impossible de suivre une émission de la DRS1.

L’article 24 de la LRTV fixe le mandat de la SSR. On peut notamment y lire l’objectif de « compréhension, de cohésion et d’échange entre les différentes communautés linguistiques du pays ». Comment voulez-vous que cet objectif soit atteint si, à l’exception des bulletins d’information, les émissions sont en Schwytzerdütch ?  Le bagage acquis à l’école devrait, du moins théoriquement, nous permettre de comprendre un minimum les DRS et les SF. En privilégiant systématiquement le dialecte, cet objectif ne peut être atteint. Que les chaînes privées parlent dans la langue de leur choix m’importe peu. Mais, par soucis de cohésion nationale et de respect de son mandat, on devrait réclamer que le service public soit diffusé dans la langue que tous les Suisse apprennent, soit l’allemand.
J’ajouterai encore que ce même article stipule que la SSR a pour mandat de fournir un service dans les trois langues nationales. De nouveau, j’ai beau tourner dans tous les sens l’article 4 de notre Constitution, la langue nationale reste l’allemand, pas le Suisse allemand. En nous proposant des débats, des reportages et des magazines exclusivement dans le dialecte, la SSR ne remplit pas son mandat, et c’est une perte importante pour nous, Suisses Romands et Tessinois qui ne pouvons pas observer notre pays par les médias publiques de 70% de nos confédérés. Dommage.


Réponses

  1. 100% d’accord avec ton article. Même constat après avoir aussi étudié en suisse allemande. Très difficile aujourd’hui encore de suivre une conversation soutenue en suisse allemand. Conséquence: on se met à parler en anglais à nos compatriotes ! C’est plus cool, mais pas terrible pour le fédéralisme.


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